Le soleil régnait dans le ciel d'un bleu parfait, aucun nuage ne pouvait venir le tacher.
Ses rayons brûlaient le sable, ne laissant nulle place à l'ombre qui devrait attendre sa
maîtresse la nuit pour espérer reconquérir ces territoires.
Cela faisait trois jours qu'elle avait quitté l'oasis, océan de verdure perdu dans l'immensité du
désert. Ses outres étaient maintenant vide depuis plusieurs heures; il ne restait que sa sueur
ruisselant sur son corps comme trace d'humidité. Parfois une goutte venait s'écraser sur le sol,
aussitôt engloutie par des millions de grains trop heureux de récupérer ce précieux liquide.
Son regard ne percevait aucune trace de salut, la ligne d'horizon refusant de dévoiler le moindre
détail. Même les animaux de ces contrées semblaient avoir compris que cet endroit n'offrait
aucune chance de survie. Elle ne se souvenait même plus de sa dernière rencontre avec une
créature vivante.
Soudain ses jambes refusèrent de porter son corps plus longtemps. Elle tomba mollement sur ce
matelas brûlant, résolue à accepter son destin. Elle n'avait pas peur de mourir, chaque jour en
valait un autre pour passer de l'autre côté de la barrière, elle l'avait bien compris en
traversant les diverses épreuves de sa vie.
Alors qu'elle fermait doucement les yeux, elle remarqua un objet à moitié dissimulé sous le sable.
Le soleil reflétait quelque chose à peine à quelques pas d'elle. Sans trop savoir pourquoi elle
demanda à son corps un nouvel effort afin de satisfaire une dernière fois sa curiosité.
Sa main rencontra une surface dure, cuivrée. L’objet était petit et tellement banal ... une
simple lampe à huile; même décorée de motifs dont elle ignorait la signification cette lampe
semblait sans intérêt. Son esprit lui rappela ses histoires d'enfance, de génies qui sortent de
lampes magiques et qui accordent trois voeux avant de disparaître. Que n'aurait-elle pas donné
pour un peu d'eau ? ... machinalement sa main se mit à frotter la lampe.
Elle cru qu'elle avait basculé dans la folie quand une fumée se mit à sortir de la lampe et
forma un nuage tout autour d'elle. 'Je suis victime d'un mirage', pensa-t-elle mais les
apparitions tendent rarement une gourde remplie à ras bord d'une eau d'une exquise fraîcheur.
Ses lèvres refusaient de se séparer du goulot de peur de perdre ce trésor mais une voix douce
déclara doucement qu'elle pourrait en boire autant qu'elle le voudrait. La fumée s'était dissipée
pendant qu'elle se désaltérait et elle pouvait maintenant mieux voir celui qui venait de la
sauver. Il ne ressemblait pas vraiment à un mirage mais bien plus à un nomade du désert si ce
n'est qu'il ne portait qu'un bref morceau d'étoffe pour protéger son corps des dangers du soleil.
'Es-tu un génie ?', lui demanda-t-elle d'une voix hésitante.
'Oui, je suis ce que tu appelles un génie, mais je suis juste une âme emprisonnée par un djinn
aux mauvaises intentions qui n'a pas trouvé de plus vile manière pour se débarrasser d'un rival
pour son amour.'
'Génie, tu m'as sauvé, alors maintenant c'est à mon tour de faire de même pour toi, dis-moi quels
sont tes désirs et je les réaliserai.'
'Tu ressembles tellement à celle que j'ai aimé et que j'aime encore. Je voudrais te prendre et
remplir ton coeur et ton corps de ce désir qui m'habite depuis si longtemps.'
'Viens' fut le seul mot qu'elle prononça. Elle l'attira contre lui, passant ses mains dans son
dos pour une étreinte passionnée. Le maigre morceau de tissu ne dissimulait pas le désir qui
était en train de l'envahir. Elle comprit qu'aucun soleil ne serait plus chaud que leurs corps
emmêlés, qu'aucun astre ne pouvait briller d'une telle passion.
Son corps le réclamait, elle écarta ses jambes en signe d'invitation. Un cri troua le silence du
désert quand il la pénétra. Doucement, tendrement, il prit possession d'elle, de son corps de
déesse. Sa bouche dessinait un délicat sourire et ses yeux parlaient le langage universel.
Il s'allongea délicatement sur elle, son bassin entamant un rythme dont le corps connaît la
mesure, même s'il n'est pas musicien.
Sa tête allait de gauche à droite, d'avant en arrière. Elle se rendit compte que sa tête heurtait
la lampe ... produisant des notes comme des coups de sonnette ...

'Ding ... ding ... ding', elle se réveilla alors que le facteur sonnait pour la quatrième ou
cinquième fois. C'était trop injuste de ne pouvoir finir un rêve si agréable. Elle enfila
rapidement sa robe de chambre et rendit mollement son sourire au facteur tout étonné de voir une
personne si charmante derrière la porte.
'Un colis pour vous madame', lui annonça-t-il avec sa plus belle voix.
Elle le remercia rapidement et ferma la porte sans attendre plus longtemps, posa le colis sur une
table et retourna se coucher afin de rattraper ce rêve si agréable. Mais plus aucune image ne
vint nourrir son esprit.
Elle était de mauvaise humeur quand elle se décida de se lever; elle avait déjà oublié le colis
lorsque qu'elle le revit sur la table. Pas d'adresse, pas de timbres, voilà qui était bizarre.
Juste deux mots écrits sur le dessus : 'Pour toi'. Un peu fébrile elle se décida à l'ouvrir.
Emballé de mille et un journaux, elle sortit de la boîte une lampe à huile ...
C'est alors qu'elle se souvint que les traits du facteur ressemblaient étrangement au génie de
son rêve ...
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